Rétrospective : l’état des marchés de l’habitation canadiens en 2020

On m’a demandé d’écrire une rétrospective de l’année 2020 pour ce blogue. J’ai donc fait le point.

Disons que l’année a été pour le moins mouvementée. D’abord, j’espère que vous êtes tous en santé (physique et mentale!).

Aucun secteur n’a échappé aux bouleversements, y compris les marchés de l’habitation canadiens, dont notre petite équipe à l’ACI suit et analyse l’évolution.

Il serait trop facile de faire un retour en arrière et de résumer ce qui s’est passé. Nous le savons déjà. Je trouve plus intéressant de faire le point sur 2020 en me rappelant nos impressions et nos réflexions à chaque moment de l’année.

À la deuxième semaine de mars, mes collègues et moi étions en train de parachever nos premières prévisions de l’année. J’étais rentré à la maison tard le 11 mars, après une partie de volleyball. Ne trouvant pas le sommeil tout de suite, j’ai consulté reddit : suspension des arrivées en provenance de Chine! Annulation de la saison de la NBA! Que se passait-il?

Le lendemain en soirée, soit le 12 mars, mon fils et moi sommes allés à l’épicerie pour acheter une carte Xbox pour la fête de son ami; je voulais aussi voir de quoi il retournait. Les files d’attente s’étiraient jusqu’au fond du magasin – je n’avais jamais vu autant de chariots. Il n’y avait plus de farine, de beurre d’arachide, de pain, de sucre, de pâtes, ni de conserves, et la section des produits surgelés avait fait l’objet d’une véritable razzia; cela n’augurait rien de bon. La section des produits biologiques? Elle débordait de ces produits, LOL.

Nous avons décidé le lendemain de mettre notre prévision d’une « année record pour les marchés de l’habitation canadiens » sur la glace. C’était probablement la bonne décision, puisque la Banque du Canada a ensuite pris la même. Mais c’est drôle de penser que nos projections se seraient révélées plutôt justes, en fin de compte!

Trois statisticiens partent à la chasse et tombent sur un chevreuil. Le premier le met en joue et tire… le ratant de trois mètres à droite. Le deuxième le met en joue et tire… le ratant de trois mètres à gauche. Le troisième s’écrie : « On l’a eu! »

Excusez cette blague méchante!

En tout cas, nous avons axé nos efforts sur les « prévisions immédiates », nous servant des données quotidiennes pour suivre l’évolution rapide de la situation le plus étroitement possible, sans nous projeter trop loin dans un avenir très incertain. Je crois que nous avons bien fait.

Chaque mois, nous avons eu l’occasion d’analyser dans un communiqué les statistiques nationales mensuelles sur l’habitation. Un peu comme quand je joue de la guitare autour du feu, nous avons peut-être raté quelques accords, mais nous avons bien rendu la mélodie. En guise de retour sur l’année 2020, voici des citations tirées de chaque communiqué mensuel cette année.

Communiqué de presse de janvier :

« Ce qui ressort de l’analyse des tendances des marchés locaux au Canada, c’est que les marchés où l’offre est historiquement serrée enregistrent une baisse plus prononcée que d’habitude de nouvelles inscriptions en janvier. Le raisonnement étant que le propriétaire-vendeur choisit non seulement le moment d’inscrire sa propriété, mais aussi le moment de la vendre. Pourquoi n’attendrait-il pas au printemps quand il fait beau et que le bassin d’acheteurs est plus grand? Si les inscriptions sont reportées, il va de soi que les ventes le seront aussi, ce qui explique en partie le déclin de l’activité en janvier. Les questions qui se posent maintenant sont de savoir combien de nouvelles inscriptions seront offertes, quel sera le niveau de la demande pour celles-ci et quel effet cela aura sur les prix. »

Montreal street in winter.

Communiqué de presse de février :

« Après des mois de décembre et de janvier plus calmes que la normale, le nombre de nouvelles inscriptions a explosé en février dans certains des marchés du pays où l’offre est particulièrement anémique. C’est donc sans surprise que les ventes ont suivi. Il y a lieu de se demander quelle est l’importance de la demande comprimée dans les régions du pays où le nombre d’inscriptions est faible depuis un certain temps. Cela dit, il faudra que le nombre de nouvelles inscriptions augmente pendant plus d’un mois pour que certains de ces marchés commencent à évoluer ne serait-ce que vers un semblant d’équilibre. Dans l’intervalle, il faut s’attendre à ce que les prix continuent de grimper en raison de la concurrence entre les acheteurs pour les inscriptions actuelles. »

La COVID-19 frappe!

Communiqué de presse de mars :

« Les statistiques de mars 2020 reflètent deux réalités bien distinctes. La forte croissance des ventes et des prix a eu lieu durant la période pré-COVID-19. Pour comprendre ce que nous réservent les prochains mois, il faut regarder les chiffres de la deuxième moitié de mars et ne pas oublier que c’est seulement à la quatrième semaine que le ralentissement le plus important a eu lieu. Les données préliminaires de la première semaine d’avril suggèrent que le nombre de ventes et le nombre de nouvelles inscriptions n’ont atteint que la moitié de leur niveau habituel pour cette période de l’année. »

City skyline.

Communiqué de presse d’avril :

« Comme bon nombre d’aspects de notre vie quotidienne, bien des activités du marché immobilier canadien ont été mises en suspens. Cela dit, on décèle des signes de reprise dans les premiers chiffres de mai, tant au niveau des ventes que des inscriptions, ce qui porte à croire que les technologies virtuelles nouvelles et existantes ont été adoptées par nos membres et leurs clients. Ces outils ont permis de poursuivre plusieurs activités essentielles de façon sécuritaire et demeureront vraisemblablement indispensables pendant un certain temps. »

Small town sunset

Communiqué de presse de mai :

« Nous voyons des résultats assez contrastés en mai – les ventes et les inscriptions affichent une hausse marquée d’un mois à l’autre, mais elles sont nettement inférieures à celles de la même période l’an dernier. De façon globale, nous sommes sur la bonne voie, mais nous avons encore beaucoup de chemin à faire. Cela dit, ces chiffres ont augmenté discrètement de façon constante depuis la mi-avril jusqu’à la première semaine de juin. Le mois de juin pourrait donc s’avérer semblable à celui de mai. Puisque les ventes et les nouvelles inscriptions ont diminué et augmentent maintenant en tandem, et que l’offre globale continue de s’amincir, les prix semblent tenir bon à ce stade-ci. »

Montreal landscape.

Communiqué de presse de juin :

« Alors que les résultats de juin étaient pour la plupart revenus à des niveaux normaux, nous ne sommes évidemment pas revenus à la normale encore. Je suppose qu’il faut faire preuve d’un optimisme prudent. Le marché s’est redressé beaucoup plus rapidement que plusieurs ne l’auraient pensé, mais ce qui se passera plus tard cette année demeure inconnu. Cela dit, le suivi à fréquence élevée laisse croire que les résultats de juillet seront encore meilleurs. »

country house

Communiqué de presse de juillet :

« C’est fou, le revirement de situation qui s’est produit en trois mois. Les résultats d’avril ont établi des records tellement ils étaient faibles; mais en juillet, c’est le contraire qui s’est produit. En grande partie, ce qu’on voit en ce moment, c’est la reprise des activités qu’on aurait normalement vue plus tôt cette année. Rappelons-nous qu’avant le confinement, nous nous préparions pour le marché printanier le plus serré depuis près de 20 ans. La tranquillité du marché s’est peut-être prolongée quelques mois, mais, au bout du compte, la situation actuelle est celle que nous voyions venir en mars. Cela dit, il y a tout de même de nouveaux facteurs en jeu. Certaines inscriptions sont directement liées à la COVID-19, alors que l’inscription de nombreuses autres propriétés est retardée pour la même raison. En effet, à certains endroits, le nombre de propriétés à vendre n’a jamais été aussi bas en 16 ans. Certains achats seront sûrement retardés. Or, certains éléments du quotidien, comme l’importance d’un chez-soi, l’inutilité pour bien des gens de se déplacer pour aller travailler et le besoin de passer plus de temps dehors, d’avoir son espace personnel et un bureau à la maison, n’ont jamais été aussi importants et créent sur le marché une effervescence qu’on n’aurait pas eue sans la COVID-19. »

Pretty house

Communiqué de presse d’août :

« Beaucoup seront surpris d’apprendre qu’à la fin du mois d’août, les ventes de propriétés en 2020 avaient complètement rattrapé le niveau de l’année dernière à la même période; la barre n’est cependant pas très élevée, car le premier semestre de 2019 n’était pas vraiment impressionnant. Il serait plus utile de se demander où nous en sommes aujourd’hui par rapport aux prévisions avant le début de la pandémie, et de ce point de vue, il y a encore beaucoup de rattrapage à faire. Malgré quelques sommets et creux mensuels historiques cette année, huit mois d’activité et des signes de ralentissement en septembre, l’année 2020 semble être une année assez moyenne dans l’ensemble – plus faible que dans un monde sans COVID-19, mais bien meilleure que nous l’aurions prédit en avril ».

Fall skyline

Communiqué de presse de septembre :

« Nous commençons à connaître la chanson des records (en parlant des nombreux nouveaux records), mais les ventes et les prix des propriétés au Canada ont de nouveau battu des records en septembre, tout comme en juillet et en août, dans un contexte de resserrement économique sans précédent. Plusieurs explications de cette conjecture ont été avancées, notamment : la demande refoulée en raison du confinement, le soutien continu du gouvernement, des taux d’intérêt incroyablement bas, et la répartition des pertes d’emploi. Je tiens aussi à souligner que les ventes et le resserrement des marchés frôlaient déjà les niveaux record en février, soit tout près de l’état actuel et d’un marché plus déséquilibré que jamais. Mais, je pense qu’un autre facteur à noter, qui est sans précédent, est la nouvelle importance que les gens ont accordée au foyer pendant cette période. Il est devenu notamment le bureau, la salle de classe des enfants, la salle de sport et le parc. L’espace personnel a plus de valeur que jamais. »

Nova Scotia Street

Communiqué de presse d’octobre :

« Si vous attendez que le marché de l’habitation canadien se calme après la relance étonnamment vigoureuse de l’été, vous devrez patienter encore un peu. Les tendances que nous observons depuis juillet – ventes et prix records dans un contexte de restriction de l’offre – se sont manifestement poursuivies en octobre. Au fil des derniers mois, alors que des données exceptionnelles étaient enregistrées, les ventes cumulatives ont non seulement rattrapé celles de l’an dernier, ce qui est déjà surprenant, mais à l’heure actuelle, elles sont en voie d’établir un record annuel. De nombreuses raisons ont été citées pour expliquer cette vigueur alors que bien des moteurs habituels du marché, notamment la croissance économique, l’immigration, l’emploi et la confiance, sont actuellement au ralenti. Il y a lieu de s’interroger sur le nombre de ménages qui ont choisi de déménager en raison de la COVID-19 et des changements qui en ont découlé. Bon nombre de ces transactions ou cette ébullition du marché n’auraient peut-être pas eu lieu dans un monde sans COVID-19. »

Saskatchewan

Communiqué de presse de novembre :

« Si je devais résumer l’évolution du marché canadien en 2020, je dirais qu’on est passés du marasme à cause de la COVID à une effervescence en dépit de la COVID. On ne le saura qu’au fil d’arrivée, mais 2020 s’annonce comme une année record pour les ventes résidentielles au Canada, malgré une offre historiquement faible. Nous sommes presque en 2021, et même si les conditions au pays n’ont jamais été aussi serrées, les ventes continuent d’atteindre des sommets. Je ne m’attends pas à ce que cette situation, portée par la pandémie, revienne à la normale la veille du Nouvel An, mais au moins la vaccination offre une lueur d’espoir. L’immigration et la croissance démographique repartiront à la hausse, les taux hypothécaires demeureront sans doute très bas et il sera plus important que jamais d’avoir un chez-soi. De plus, les bouleversements quotidiens engendrés par la COVID continueront probablement d’inciter des gens à déménager. Il se pourrait même que nos prévisions de nouveau record de ventes en 2021 s’avèrent trop modestes. »

neighbourhood

Un grand merci à mes collègues Chris Jokel, Doug Blissett, Ryan Biln et Jacob Coopersmith; nous avons uni nos forces cette année pour aider nos membres (d’abord et avant tout) et toutes les personnes qui s’intéressent aux marchés de l’habitation canadiens à voir clair dans la situation. J’aimerais aussi remercier notre ancien patron, Gregory Klump, qui est maintenant retraité, de nous avoir donné la chance de travailler à l’ACI et de nous avoir encouragés à mettre les bouchées doubles.

Quelle année nous avons traversée! Je termine avec une énigme : « Jusqu’où peut-on s’enfoncer dans une forêt? » La réponse est : « jusqu’au milieu », parce qu’après on en ressort. Je vous transmets à tous mes vœux de bonheur les plus sincères pour 2021.

Directeur et économiste principal, Données sur l’habitation et analyse du marché, Shaun Cathcart fournit des renseignements sur le marché de l’habitation aux chambres, associations, membres et intervenants de l’immobilier. Il passe la majeure partie de son temps à analyser les tendances du marché canadien de l’habitation et à écrire sur le sujet. Dans ses temps libres, on peut le voir à bicyclette, au terrain de volleyball ou heureux de passer du temps avec sa famille.


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