À bien des égards, la pandémie de la COVID-19 a amplifié les tendances qui se manifestaient déjà sur les marchés immobiliers résidentiels au Canada. Malgré la pandémie, l’année 2020 s’est terminée sur note fort positive et tout porte à croire que la situation restera la même en 2021. Le rôle que joueront les vaccins contre la COVID-19 reste à voir, mais maîtriser cette pandémie pourrait susciter un regain d’intérêt pour la vie en milieu urbain.
Après s’être refroidi en mars 2020 suite au premier confinement du pays, le marché des maisons unifamiliales est en pleine effervescence et a poursuivi cette tendance, alimentée par les besoins d’espace pour les travailleurs à domicile et par les Canadiens plus âgés qui devancent leurs projets de retraite dans les régions de villégiature. À la fin décembre, les ventes ont bondi de 47,2 %, le prix moyen national a augmenté de 17,1 %, alors que l’Indice des prix des propriétés MLS® (IPP MLS®) a grimpé de 13 % par rapport à l’an dernier. Le marché immobilier au Canada est passé d’une lenteur causée par la COVID à une effervescence en dépit de la COVID.
Cette performance s’explique par la demande musclée, la persistance des faibles taux d’intérêt et le resserrement continu de l’offre de logements, explique l’économiste principal à l’ACI Shaun Cathcart. « Avec l’arrivée des vaccins contre la COVID-19, il reste à savoir comment le marché va réagir – et quelles sont les tendances qui risquent de se poursuivre? »
L’exode urbain se poursuivra
Selon certains, il semblerait que les Canadiens aient fait leurs boîtes et quitté massivement les villes en très grand nombre en 2020 en raison de la pandémie. Cette tendance à l’exode était probablement exagérée, selon M. Cathcart.
« Un flux naturel d’acheteurs qui quittent les villes fait partie du cycle immobilier : de jeunes familles déménagent là où il y a plus d’espace pour les enfants, les retraités recherchent des endroits plus calmes et panoramiques. Ces déménagements ont pu sembler plus marqués l’année dernière, car ils n’ont pas été compensés par le flux habituel de jeunes acheteurs et de nouveaux Canadiens vers les villes en raison des restrictions liées à la pandémie. »
Selon M. Cathcart, des régions comme le Grand Toronto continueront probablement à connaître un exode urbain en 2021 au profit de villes voisines de petite et moyenne taille où les gens peuvent trouver de l’espace, et ce, sans renoncer à l’accès aux hôpitaux, aux écoles et aux commodités urbaines telles qu’un Internet performant.
« Cette tendance était déjà présente avant la pandémie, car les gens cherchaient des maisons plus abordables. On disait, « Éloignez-vous pour pouvoir acheter » : quittez le centre-ville jusqu’à ce que vous atteigniez une zone où vous pourriez obtenir un prêt hypothécaire abordable. »
Aujourd’hui, comme le télétravail persistera probablement, et ce, même après que la pandémie s’atténue, un plus grand nombre de personnes pourraient opter d’habiter loin des villes parce qu’elles n’ont pas besoin de se déplacer, dit-il.
« Un flux naturel d’acheteurs qui quittent les villes fait partie du cycle immobilier […] Ces déménagements ont pu sembler plus marqués l’année dernière, car ils n’ont pas été compensés par le flux habituel de jeunes acheteurs […] en raison des restrictions liées à la pandémie. »
Shaun Cathcart, ACI
Le besoin d’espace va stimuler la demande
Le désir de disposer de plus d’espace se manifeste également en dehors des marchés de banlieue, s’étendant jusqu’aux régions de villégiature, selon les courtiers immobiliers Chuck Murney en Ontario et Len Wassill en Saskatchewan.
« Alors qu’auparavant un couple pouvait se contenter d’une copropriété à une chambre à coucher, ce type d’acheteur a maintenant besoin d’espace pour travailler à la maison », explique M. Murney, un courtier qui dessert la région de Parry Sound-Muskoka-Baie Georgienne. Les copropriétés à deux et trois chambres à coucher sont beaucoup plus convoitées que les unités à une chambre à coucher, dit-il, et les maisons unifamiliales volent la vedette aux copropriétés. De nombreux acheteurs à la recherche de valeur ajoutée en milieu rural préfèrent des maisons situées au bord de l’eau pouvant être habitées à l’année.
Selon M. Wassill, courtier immobilier à Melville, en Saskatchewan, les tendances semblables se dessinent dans son marché. Les acheteurs de tous les groupes d’âge et de tous les stades de la vie sont à la recherche d’espace, de propriétés riveraines et de maisons clés en main, dit-il. Les garages sont également importants, tout comme la conformité avec les autres propriétés du quartier. « Des caractéristiques comme celles-ci sont importantes pour la valeur de revente et la possibilité de vente future, une priorité pour les acheteurs. »
Les vaccins pourraient relancer le marché de la copropriété
Malgré l’exode et la demande d’espace de vie, les marchés urbains continueront d’être très actifs, selon l’agente immobilière torontoise et présidente de la Toronto Regional Real Estate Board, Lisa Patel. « Les gens voudront toujours profiter de la vie urbaine. L’engouement est par ailleurs toujours là et certaines personnes ont encore un faible pour le mode de vie en copropriété », déclare-t-elle.
Les vaccins contre la COVID-19 pourraient aider en amenant les gouvernements à assouplir les restrictions et à relancer l’immigration qui, selon M. Cathcart, est un moteur essentiel de la croissance urbaine.
Les vaccins pourraient également conduire à l’inscription d’un plus grand nombre de maisons unifamiliales en 2021. Avec l’assouplissement ou la suppression des directives relatives à la distanciation physique, les vendeurs pourraient se sentir plus à l’aise pour rencontrer les agents en personne et faire visiter leur maison, ce qui est important en raison du faible inventaire au Canada.
« Quelle que soit l’évolution des goûts et des préférences à mesure que nous sortons de la pandémie de la COVID-19, en gros, l’offre de logements au Canada est trop faible par rapport à la demande, » explique M. Cathcart. « Avec si peu de logements à vendre en ce moment, la mesure dans laquelle cette demande excédentaire aura une incidence sur les ventes ou les prix dépendra avant tout du nombre de propriétaires qui mettront leur maison en vente cette année. »
Les nouvelles inscriptions seront une statistique importante à surveiller, dit-il, notamment au printemps.
L’offre demeure faible; les ventes devraient rester vigoureuses
Même avec une certaine progression du nombre de maisons à vendre sur le marché de la revente, le nombre de propriétés disponibles au Canada demeurera relativement bas par rapport à la demande en 2021. Le 1er janvier, l’inventaire a reculé pour se situer à un équivalent de deux mois d’inventaire – un niveau plancher, et moins de la moitié de la moyenne à long terme de cinq mois. Cette pénurie entraînera probablement une hausse de 9,1 % du prix moyen à l’échelle nationale en 2021 pour atteindre 620 400 $. Les ventes résidentielles nationales devraient progresser de 7,2 % pour atteindre 584 000 unités l’an prochain. (Les ventes devraient croître dans toutes les provinces sauf l’Ontario en raison d’une pénurie de l’offre.)
Cela signifie que le nombre élevé de ventes et les augmentations des prix se poursuivront probablement au Canada en 2021, notamment compte tenu de l’engagement des décideurs politiques à garder les taux bas jusqu’à au moins 2023, soutient M. Cathcart.
Comment les courtiers et agents immobiliers peuvent-ils donc tirer parti de cette dynamique de marché? M. Wassill conseille de continuer à se concentrer sur les fondamentaux : un service de qualité, les connaissances, le professionnalisme – être un conseiller de confiance pour les clients.
« Nous ne pouvons rien tenir pour acquis : un vaccin, des prix élevés. Un marché fort peut se retourner rapidement. Travaillez sans relâche, car il arrive toujours de bonnes choses aux personnes qui abordent la vie de cette façon », dit-il.