Les dangers de la fraude par virement électronique pour les acheteurs d’une propriété qui versent une mise de fonds sont de plus en plus préoccupants, selon certains experts. Les courtiers et agents immobiliers doivent informer leurs clients des dangers de ces arnaques afin qu’ils soient conscients des risques, qu’ils soient mieux à même d’identifier les signaux d’alerte et qu’ils prennent des mesures pour se protéger lors de transactions importantes.
« Nous devons faire preuve d’une diligence accrue et être plus vigilants que jamais, déclare Simeon Papailias, agent et directeur associé de REC Canada, de la bannière Royal LePage. En tant que professionnels de l’immobilier, il est de notre devoir de protéger les données de nos clients. »
Les virements électroniques peuvent comporter des risques inattendus. Ils sont conçus pour être irréversibles afin de permettre au destinataire d’utiliser les fonds immédiatement. Toutefois, si les numéros de compte sont erronés (par inadvertance ou volontairement), l’argent peut disparaître à jamais. On ignore combien de virements électroniques se déroulent mal chaque année, mais selon le Financial Post, ils figurent parmi les principales plaintes relatives aux produits bancaires déposées auprès de l’Ombudsman des services bancaires et d’investissement.
M. Papailias explique qu’il a vu des cas où les fraudeurs ciblent des personnes qu’ils croient moins protégées, par exemple des personnes qui utilisent les médias sociaux (en particulier la messagerie directe) de manière trop nonchalante ou qui envoient des courriels non sécurisés contenant des informations personnelles, pour les hameçonner. Dans les attaques par hameçonnage, des messages frauduleux prétendant provenir d’entreprises ou de personnes de bonne réputation tentent d’inciter les gens à révéler des informations sensibles telles que des numéros de compte.
« Ces messages diront, par exemple, à l’approche de la clôture d’une vente, qu’un acompte supplémentaire de 10 000 $ doit être versé », ajoute-t-il.
M. Papailias suggère aux courtiers et agents immobiliers d’ajouter au dossier remis à l’acheteur des informations sur la protection des renseignements personnels en ce qui concerne les acomptes et les mises de fonds, afin de sensibiliser les acheteurs aux risques de fraude par virement électronique et aux précautions supplémentaires à prendre lorsqu’ils utilisent cette méthode pour transférer des fonds lors de l’achat d’une propriété. Ils peuvent également conseiller à leurs clients de demander conseil à leur institution financière ou à un avocat spécialisé en immobilier ou un notaire.
« Une simple mise en garde à l’acheteur ne suffit plus », dit-il.
L’acompte versé par un acheteur est généralement détenu en fiducie par l’agence immobilière jusqu’à la clôture de la transaction, et un avocat ou un notaire se charge du transfert des fonds. L’avocat ou le notaire du propriétaire-vendeur s’occupe du remboursement de toute hypothèque existante et des commissions dues, puis lui remet le produit de la vente. En réalité, les fraudeurs ciblent de mieux en mieux ces transactions et il peut être difficile de s’en rendre compte dès le départ. Si un client perd de l’argent à la suite d’une fraude par virement électronique, il a malheureusement peu de chances de le récupérer.
L’un des moyens dont disposent les acheteurs pour se protéger de la fraude électronique est de s’assurer qu’ils ont au moins rencontré leur avocat ou leur notaire virtuellement ou en personne, et de vérifier les informations du compte fiduciaire de ce dernier lors de cette rencontre. Ils ne doivent jamais faire confiance à un courrier électronique prétendant être l’adjoint de l’avocat ou du notaire ou le « service financier » du cabinet, avec une pièce jointe détaillant les informations relatives au virement électronique. L’acheteur pourrait s’exposer à des arnaqueurs disant être à l’emploi du cabinet d’avocats ou de notaires, envoyant des instructions de virement qui ne correspondent pas au compte fiduciaire de l’avocat ou du notaire. Les acheteurs peuvent également choisir de verser leur acompte autrement, comme par traite bancaire.
Larry Winton, associé chez Fogler, Rubinoff LLP à Toronto, raconte une transaction commerciale de grande envergure dans laquelle il a été impliqué, et qui offre des leçons importantes que tout avocat spécialisé en immobilier, notaire et courtier ou agent immobilier devrait retenir. M. Winton ajoute que les confirmations verbales avec l’avocat ou le notaire de l’autre partie pour vérifier les instructions de virement sont indispensables dans toute transaction, avant que l’argent ne soit envoyé. « Il ne faut jamais croire quelqu’un sans avoir eu des preuves tangibles. »
Dans cette transaction, où des millions de dollars étaient censés être versés à l’un de ses clients, M. Winton avait envoyé par courrier électronique les instructions de virement à l’avocat de l’autre partie. Lorsque l’argent n’est pas arrivé le lendemain, des appels ont été faits et les services informatiques ont été sollicités. Il a été établi que le courriel qui avait quitté le serveur de M. Winton contenait les instructions correctes, mais le courriel reçu sur le serveur de l’autre partie ne les contenait pas.
Quelqu’un avait piraté le serveur de l’autre partie, intercepté le message, l’avait copié avec le même titre et la même formulation que dans le courriel de M. Winton, mais avait glissé d’autres instructions de virement. Heureusement, la banque a pu empêcher l’arnaqueur de transférer l’argent rapidement puisque ce dernier avait d’abord transféré les fonds dans une banque canadienne et non hors du pays.
Nick Poon, associé de Gilbertson Davis LLP, a été témoin d’escroqueries semblables.
Selon M. Poon, un autre type de fraude courante dans les transactions immobilières concerne l’usurpation d’identité des propriétaires; les fraudeurs s’approprient l’identité d’un propriétaire et contractent un prêt hypothécaire ou une marge de crédit sur la propriété. Le propriétaire ne s’en aperçoit que lorsque l’institution financière lui envoie un avis de défaut de paiement. Il est alors généralement trop tard pour récupérer l’argent.
« Les gens doivent simplement être conscients qu’il existe des fraudeurs et des arnaqueurs qui cherchent à s’emparer des fonds le plus rapidement possible, explique M. Winton. De nombreuses technologies ne sont pas sécurisées, et il y a des gens très rusés qui peuvent accéder aux comptes. Il suffit de surveiller les courriels des gens et de chercher des mots comme « transfert » ou « fonds » pour s’approprier ces comptes.
Il existe de mauvaises personnes, et on doit tous pouvoir les reconnaître. Il est possible d’éviter plusieurs problèmes si l’on est prudent et si l’on prend des mesures raisonnables. Un appel téléphonique peut complètement contrecarrer les capacités d’un arnaqueur. »
Les banques semblent toutefois se montrer plus prudentes. Janice Fox, agente et dirigeante d’agence, se souvient d’une transaction dans laquelle l’un de ses clients, un citoyen canadien vivant au Royaume-Uni, cherchait à acheter un condo à Toronto. Puisque son fils poursuivait ses études dans la ville, son client avait l’intention d’y déménager. Après avoir contacté la banque, il s’est vu répondre que, s’il ne se présentait pas en personne en succursale, la banque ne traiterait pas de virement électronique et ne préparerait pas de traite.
« Pas de zone grise, pas de marge de manœuvre », explique Mme Fox. Le fils du client ne pouvait pas s’en occuper à sa place, et un appel par vidéoconférence pour approbation ou une confirmation notariée de l’identité n’étaient pas des options.
« La banque a affirmé que la fraude électronique est si répandue que si le client n’est pas présent en personne, elle ne donne pas suite aux instructions de virement », explique-t-elle.
L’information peut être la meilleure défense pour les acheteurs. Les courtiers et agents immobiliers peuvent aider leurs clients en les orientant vers des ressources telles que l’Agence de la consommation en matière financière du Canada sur des questions telles que les transferts d’argent et la fraude, y compris la manière de se protéger lorsqu’il s’agit d’effectuer des transactions bancaires en ligne. Le Centre antifraude du Canada est également une bonne ressource pour savoir ce qu’il faut faire et où signaler une fraude. Les courtiers et agents immobiliers doivent également garder en tête les ressources générales de sensibilisation à la cybersécurité qui peuvent fournir aux clients des informations à jour sur les dernières méthodes utilisées par les arnaqueurs pour effectuer des fraudes électroniques (par exemple, le vol d’identité, le piratage, l’hameçonnage).
L’article ci-dessus est publié à titre informatif; il ne constitue nullement des conseils financiers ou juridiques et ne saurait remplacer un conseiller juridique.