L’achat d’une propriété représente l’investissement le plus important que la plupart des familles canadiennes réaliseront, et il sert souvent de base à la création d’un patrimoine. Or, les familles n’ont pas toutes des chances égales d’acheter la résidence de leurs rêves.
Un nouveau programme de l’Initiative BlackNorth (BNI) promet de refermer l’écart entre les Canadiens noirs et le reste de la population en matière d’accession à la propriété, ce qui donne de l’espoir aux familles noires de classe moyenne partout au pays.
Engagement des chefs de la direction
L’Association canadienne de l’immobilier (ACI) est fière de s’associer à la BNI en tant que signataire de son Engagement des chefs de la direction. Elle s’est ainsi engagée à améliorer la représentation des personnes noires au sein de son personnel et de sa direction. Promettant publiquement de s’attaquer au racisme anti-Noir, les signataires de l’Engagement prennent des mesures pour atteindre sept objectifs qui auront notamment une incidence sur les pratiques de recrutement, la composition des équipes de cadres et des conseils d’administration, et l’affectation des dons et des commandites.
Forte du succès de l’Engagement, la BNI a adopté un état d’esprit axé sur les affaires pour établir des programmes qui appuieront les groupes en quête d’équité, en particulier les Canadiens noirs. Pour ouvrir des portes aux familles noires de tout le pays, la BNI a conçu un programme d’accession à la propriété. Financé par le gouvernement du Canada et offert en partenariat avec la Dream Legacy Foundation (DLF) et Habitat pour l’humanité Toronto, le Programme de transition vers l’accession à la propriété de la BNI en est à sa première année.
Programme de transition vers l’accession à la propriété
« Après les innombrables réunions sur cette initiative, où nous nous demandions si elle serait approuvée, et si le gouvernement, les entrepreneurs et la communauté l’appuieraient, c’est très gratifiant de voir ces premières réussites », explique Isaac Olowolafe Jr., fondateur de la DLF.
Dans le cadre du partenariat, la DLF s’occupe du processus de demande, des relations avec la communauté et des communications avec les familles, tandis qu’Habitat pour l’humanité Toronto aide à l’acquisition des propriétés qui seront achetées dans le cadre du programme. La BNI administre le programme et coordonne l’ensemble des activités.
Ce programme vise à régler un problème générationnel urgent.
En 2018, des données de Statistique Canada ont confirmé ce que les communautés noires du Canada savaient déjà : l’accession à la propriété est un rêve impossible pour une grande partie d’entre elles. Seulement 48 % de la population noire vivait cette année-là dans un logement appartenant à un membre de leur ménage, alors que la moyenne nationale était de 73 %.
Pour aider plus de ménages noirs à devenir propriétaires, la BNI a cherché des partenaires qui auraient à cœur d’aider ces familles à accéder à un avenir meilleur.
« Dans certaines communautés, certaines cultures et certains milieux, l’accès à la propriété va de soi, mais pas pour nous. Cela ne fait pas partie de notre éducation, on ne nous l’a jamais présenté comme une option », explique Dahabo Ahmed-Omer, directrice générale de la BNI.
« C’est notre réalité à l’heure actuelle. Les choses changent, évidemment – le travail de l’ACI et notre travail portent leurs fruits – mais c’est encore difficile à accepter pour la plupart des communautés noires, parce que l’accès à la propriété n’a jamais été une option pour elles. »
Lors d’une conférence de presse en février 2022, l’honorable Ahmed Hussen, ministre du Logement et de la Diversité et de l’Inclusion, a annoncé un financement fédéral de 10 millions de dollars pour la première phase du Programme de transition vers l’accession à la propriété, ce qui allait aider 200 familles à acheter leur première résidence dans le Grand Toronto. Pour aider encore plus de familles à devenir propriétaires, la BNI prévoit offrir le programme à d’autres collectivités après la conclusion de la première phase, en tirant parti du réseau sans cesse grandissant de relations que la DLF entretient avec des communautés de partout au pays.
Obstacles systémiques
« Dans tous les aspects de la société, les Canadiens noirs se butent à des obstacles systémiques, y compris pour se trouver un foyer abordable et sécuritaire », a déclaré le ministre Hussen au moment de l’annonce. « Nous voyons constamment les besoins en logement des Canadiens noirs augmenter, pourtant ils sont toujours bien moins nombreux à devenir propriétaires par rapport à la population moyenne. Nous reconnaissons qu’il y a là un enjeu systémique qui doit être réglé. »
Jusqu’à présent, Mme Ahmed-Omer croit que l’accession à la propriété « avait toujours représenté un défi pour les communautés noires. Elles ne croient pas appartenir à ce monde-là, et c’est ce que nous voulons changer, parce qu’il est possible de créer des occasions. Elles ne se permettent même pas d’y rêver parce qu’elles n’ont pas accès à cette possibilité depuis des générations. » Selon la BNI, le logement à Toronto est fortement racialisé – 75 % des résidents qui s’identifient comme blancs ont un revenu supérieur à la moyenne et sont propriétaires, tandis que 69 % des résidents qui sont racialisés ont un revenu inférieur et sont locataires. En parallèle, le prix d’une maison familiale, qui représentait 4 à 4,5 fois le revenu moyen en 1990, est passé aujourd’hui à 15 à 16 fois ce revenu. « L’accession à la propriété a permis à des générations de Canadiens d’accumuler des capitaux propres pour démarrer des entreprises, soutenir les études postsecondaires des enfants, assurer la retraite et transférer la richesse aux enfants, cependant, la communauté noire a été laissée de côté. »
Le programme de la BNI donne aux familles admissibles un accès à la propriété, mais nombre de familles ne répondent pas à ses critères actuels. Mme Ahmed-Omer a bon espoir que ces familles pourront y avoir accès dans l’avenir, et juge nécessaire d’accroître la littératie financière au sein de la communauté noire – un facteur clé de la réussite du programme à long terme.
« Le principal problème au sein de la communauté, c’est que ses membres ne savent pas où se trouve le manque à gagner. Non seulement nous les aidons à le repérer, mais nous intégrons de la formation et des occasions d’apprentissage au programme. Il s’agit un peu d’un guichet unique : si vous êtes admissible, présentez une demande ici, suivez le processus ici, et vous pourrez avoir une propriété ici; si vous n’êtes pas admissible, voici comment vous pouvez le devenir. Cet enseignement a autant d’importance que le reste. »
Conformément à cette approche axée sur le client, la BNI tenait à trouver une entreprise appartenant à des personnes noires bien établie dans le secteur du logement pour s’occuper des relations avec les familles participantes. « Il était essentiel pour nous que le volet des relations soit assuré par des membres de la communauté noire, parce qu’ils sont bien placés pour comprendre la situation des familles participantes. Nous voulions trouver un partenaire qui pourrait tisser ce genre de liens », explique Mme Ahmed-Omer.
Selon la DLF, la communauté noire a non seulement été laissée pour compte en matière d’accès à la propriété, mais dans tout le secteur du logement. Dans le cadre de sa stratégie globale, la fondation veut donner aux petites entreprises et aux travailleurs noirs des occasions dans le secteur des métiers spécialisés et dans l’industrie multimillionnaire de la construction, ce qui stimulera la situation économique dans la communauté noire.
Selon M. Olowolafe, le Programme de transition vers l’accession à la propriété aura des retombées à trois niveaux. « Premièrement, le programme permettra à 200 familles de devenir propriétaires. Deuxièmement, on pourra tirer parti de cette réussite pour trouver un toit à des milliers de familles au Canada. Troisièmement, on pourra intégrer la chaîne d’approvisionnement qui fournit ces logements. »
La BNI juge que la réussite du programme transparaîtra également dans la manière dont les familles participantes pourront mener leur vie. Elles auront une plus grande stabilité financière, elles pourront aider leurs enfants qui veulent faire des études postsecondaires, elles prendront des vacances, bref, elles s’épanouiront tout en augmentant leur capital.
« Ces personnes pourront dire : “Voici ma maison, j’y ai construit ma famille, mes enfants ont grandi ici, et maintenant je peux la léguer.” Voilà ce qui, selon moi, fera la réussite du programme », conclut Mme Ahmed-Omer.